Soutien psychosocial pour les personnes avec des maladies mentales
« Je me sens plus respectée maintenant »
Le tronc est encore là dans la cours de sa maison au village de Maro. C’est une grosse pièce de bois blanche, lourde à porter et polie par les nombreuses personnes qui le touchent et s’assoient tous les jours dessus. Le tronc a été utilisé pour enchaîner Ameline pendant presque deux ans. La femme, âgée de 35 ans, souffre de sérieux troubles mentaux causés par une infection du cerveau suite à sa crise de méningite deux ans auparavant. C’est seulement lorsque la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM) l’a trouvé, que les choses ont commencée à changer.
« Dans ce village seul on compte déjà 9 cas », nous dit Françoise Milamem,assistante psychosocial avec la FLM Tchad. Elle a identifié Ameline et 4 autres personnes avec des troubles mentaux sévères, vivant tous dans des conditions terribles et inhumaines. Ils souffrent d’épilepsie, de psychoses, de schizophrénie ou d’autre problèmes de santé. Souvent, leur maladie est aggravé par le rejet de la communauté et le manque de spécialistes des maladies mentales.
Familles fatiguées, patients négligés
Les habitants de la communauté de Maro accueillent plus de 50,000 réfugiés venus de République Centrafricaine. Il n’existe que peu de ressources pour traites les problèmes mentaux et psychologiques. L’assistante psychosociale Milamem a documenté les conditions dans lesquelles elle a découvert les personnes souffrant de maladies mentales : nus, attachés et en mauvaise santé physique.
« J’avias une ordonnance pour l’hôpital, mais elle n’a pas voulu y aller », explique Adumi, le mari de Ameline. « Donc nous sommes allés chez un docteur traditionnel. » La méthode tribale de soin a surtout été très chère : Adumi a vendu de la terre et une vache pour payer le traitement de sa femme. « Nous avons dû offrir une chèvre pour le sacrifice rituel, mais cela n’a pas aidé » dit-il. En plus de leur situation difficile, la famille a maintenant une dette importante.
Pour les personnes malades mentales et leurs familles, le soutien psychosocial de la FLM Tchad intervient lorsque les personnes sont désespérées. Parfois les malades ont déjà été abandonnés par leurs familles et leurs époux.
« Elle devenait agressive avec moi, elle battait les enfants et cassait des choses, » nous dit Françoise se rappelant de l’état initial d’Ameline. « Par moments elle était mentalement absente, perdue dans son monde. »
Comme les parents d’Ameline ont refusé de les aider, son mari Adumi a dû gérer seul leurs 6 enfants et une maladie qu’il ne comprenait pas. Quand Ameline a mis le feu à la maison et détruit tous les biens de la famille, inclus les papiers d’identité et les certificats de naissances, il a décidé de l’attaché au tronc d’arbre. « Je remercie le Seigneur que la FLM nous soit venue en aide » nous dit-il.
De l’aide au-delà du traitement médical
La FLM Tchad n’offre pas des soins médicaux mais le soutient de ses équipes est essentiel afin d’identifier les cas et de convaincre les malades d’aller se faire soigner. Les nouveaux cas sont généralement identifiés grâce aux visites des maisons. Une fois par semaine, la FLM Tchad offre aussi une aide psychologique dans un centre d’écoute à Maro. « A chaque fois nous rencontrons 4 cas », nous dit Milamem, employée de la FLM Tchad. Les histoires varient et les équipes font face à des cas de maladies mentales mais aussi à des problèmes de violence conjugale, des viols ou des mutilations génitales féminines.
Après avoir convaincu Ameline de voir un docteur et de prendre les médicaments prescrit, Milamem a continué de surveiller la situation de la famille avec des visites régulières et des rendez-vous au centre d’écoute. Souvent, le traitement médical est juste une partie du long processus d’amélioration de la situation familiale.
Pour la famille d’Ameline, la priorité est maintenant de payer leurs dettes. La famille a été enregistrée dans les programmes de développement des moyens d’existences de la FLM Tchad. Adumi recevra une petite bourse afin d’ouvrir un commerce. « Ameline peut faire des petits gâteaux et je fumerais le poisson, et nous irons les vendre au marché » nous dit-il. Il a aussi défriché un champ derrière la maison pour y planter de l’arachide.
Malgré tout, Ameline a encore parfois un visage vide d’expression. « Je me sens un peu mieux » nous dit-elle calmement. Les médicaments la fatigue mais elle prépare à manger et prend soin des enfants. « Je ne l’abandonnerais pas, c’est la mère de mes enfants » dit Adumi. Il a encore peur de la laisser seule, mais comme Ameline reçoit un traitement, les voisins viennent aider.
« Je me sens plus respectée maintenant » dit Adumi. « Les gens nous saluent quand ils voient Ameline au village. Je suis très heureux de tout ce soutient. »